Traduit de l’anglais par Melanie Beauchesne
En 2016, près de 10 % de la population mondiale – soit 722 millions de personnes – vivait dans des mégapoles, soit des villes comprenant plus de 10 millions de résidents. Nous pensons généralement à de telles fourmillantes métropoles comme des milieux purement conçus par l’homme : lignes droites, arêtes de verre, d’acier et de béton.
Mais même dans les mégapoles la forêt urbaine offre aux gens des avantages considérables, selon une analyse récente parue dans la revue Ecological Modelling. De plus, la valeur des services écosystémiques fournis par les arbres urbains, évaluée à environ 1 milliard de dollars par mégapole par an, pourrait être presque doublée, simplement par le fait d’en planter plus sur les bords des trottoirs, des places publiques et des aires de stationnement.
L’étude a évalué les services écosystémiques fournis par les arbres dans 10 des 40 mégapoles du monde : Beijing en Chine, Buenos Aires en Argentine, Le Caire en Égypte, Istanbul en Turquie, Londres en Grande-Bretagne, Los Angeles aux États-Unis, Mexico au Mexique, Moscou en Russie, Mumbai en Inde et Tokyo au Japon. Les chercheurs ont utilisé un ensemble de modèles informatiques disponibles gratuitement, connus sous le nom de i-Tree Tools.
Tout d’abord, ils ont analysé les images aériennes de Google Earth pour quantifier la superficie couverte par les arbres existants dans chanque mégapole. L’étendue de la canopée d’arbres s’étend de 8,1 % au Caire à 36 % à Moscou, avec une valeur médiane de 20,9 % dans les 10 mégapoles. Cela représente 6,1 mètres carrés de canopée par personne au Caire et 98,9 mètres carrés par personne à Tokyo, avec une moyenne de 39 mètres carrés par personne dans toutes les villes.
Les arbres urbains réduisent la pollution atmosphérique, le ruissellement des eaux pluviales et l’énergie (et les émissions de carbone associées) nécessaire pour chauffer et refroidir les bâtiments, et ils améliorent également le stockage du carbone. Une étude détaillée de la forêt urbaine de Londres publiée en 2015 a quantifié la valeur de ces services écosystémiques pour cette mégapole.
Dans la nouvelle étude, les chercheurs ont utilisé ces données de Londres – en tenant compte des nombreuses différences entre les villes en termes de conditions météorologiques, charge de la pollution atmosphérique, consommation d’énergie, durée de la saison de croissance, l’étendue de la canopée, la population humaine et de la zone de la ville – afin de calculer la valeur des services écosystémiques fournis par les arbres dans les autres mégapoles.
Dans l’ensemble, la valeur médiane des services écosystémiques fournis par les arbres est de 505 millions de dollars par mégapole par an. Il s’agit de 967 000 $ par kilomètre carré de canopée, soit 32 $ par personne, et une valeur médiane de 0,12 % du PIB des mégapoles.
L’essentiel de cet avantage – une valeur médiane de 482 millions de dollars par mégapole par année – provient de la réduction de la pollution atmosphérique. Mais d’autres services sont également importants et pourraient devenir encore plus importants au fur et à mesure que le climat évolue. « Les arbres procurent des avantages directs et indirects au refroidissement des bâtiments et pour la réduction de la souffrance humaines pendant les vagues de chaleur », affirme l’auteur principal Theodore Endreny du College of Environmental Science and Forestry de Syracuse à New York. « Le bienfait direct est de fournir de l’ombre qui maintient la zone urbaine plus fraîche, le bienfait indirect est la transpiration des eaux pluviales qui transforme l’air chaud en air plus frais ».
Endreny et ses collègues ont également utilisé des photos aériennes des villes pour identifier des zones supplémentaires qui ne sont pas actuellement ornées d’arbres, mais qui pourraient l’être : « des trottoirs, terrains de stationnement et zones publiques, où la voûte s’étendrait au-dessus de la zone piétonne ou de stationnement occupé par l’homme, et où le tronc serait positionné de façon à permettre le passage des piétons ou le stationnement », expliquent les chercheurs. « La plantation d’arbres dans ces zones potentielles de canopée augmenterait de 85 % la couverture d’arbres en moyenne. » Ceci permettrait d’environ doubler les bienfaits de la forêt urbaine, pour un total de 1 milliard de dollars par mégapole par an.
Un plus grand nombre d’arbres en ville implique de faire des compromis : dans certains cas, les arbres peuvent faire augmenter la concentration de polluants atmosphériques dans les environs immédiats, et une couverture d’arbres dense peut augmenter les coûts de chauffage en hiver dans les climats froids. Et bien sûr, la plantation et l’entretien des arbres nécessitent un engagement fiscal des villes. Mais l’investissement est faible par rapport aux bénéfices, puisque la majeure partie de l’énergie nécessaire à l’expansion de la forêt urbaine est offerte gratuitement par le soleil.
Source: Endreny T et al. “Implementing and managing urban forests: A much needed conservation strategy to increase ecosystem services and urban wellbeing.” Ecological Modelling. 2017.
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